En 2003, un quotidien israélien, Haaretz, révèle qu’en août 1949 des soldats ont kidnappé, violé collectivement, puis tué et enterré une jeune bédouine du Néguev. Un crime qui s’inscrit dans la lignée des massacres commis à cette époque charnière pour terrifier ce qui restait des habitants de cette zone désertique.
Soixante-dix ans plus tard, Adania Shibli s’empare de cet "incident" dans un récit qui s’articule en deux temps nettement marqués. La première moitié relate le déroulement du crime avec une objectivité quasi chirurgicale. Elle met en scène deux personnages principaux : un officier israélien anonyme, maniaque de l’ordre et de l’hygiène, qui envahit les pages de sa présence hypnotique, et sa victime, comme lui jamais nommée. La seconde partie est narrée à la première personne, sur un ton très subjectif et ironique, par une Palestinienne d’aujourd’hui, obsédée par un "détail mineur" de l’incident : le fait qu’il se soit produit vingt-cinq ans jour pour jour avant sa naissance. Bravant les obstacles imposés par l’occupant, elle parvient à se rendre dans le Néguev dans l’espoir d’exhumer le récit occulté de la victime. Mais la détective en herbe ne tardera pas à tourner en rond...
Longuement mûri, ce roman décapant dénonce en peu de pages, au-delà du contexte israélo-palestinien, le viol comme banale arme de guerre, et aborde subtilement le jeu de la mémoire et de l’oubli.
Sindbad novembre, 2020
13.50 x 21.50 cm
128 pages
Langue :
ISBN : 978-2-330-14209-4
Prix indicatif : 16.00€
Romans et nouvelles
Adania Shibli
Née en 1974, Adania Shibli incarne une génération d’écrivains et d’artistes palestiniens qui revendiquent un engagement politique autant qu’esthétique. Actes Sud/Sindbad a publié Reflets sur un mur blanc (2004) et Nous sommes tous à égale distance de l’amour (2014). Adania Shibli a reçu en 2002 et 2004 le prix du Roman de la Fondation Quattan. La traduction anglaise de ce roman vient de paraître à Londres chez Fitzcarraldo Editions.