Amis des arts et de la culture de Palestine

Conversation avec Sari Hanafi, sociologue, directeur de Shaml

Shaml est une ONG indépendante, consacrée aux réfugiés
et à la diaspora palestiniens. Créée en 1994 par
un groupe d’intellectuels défenseurs des droits de l’homme, elle
accomplit un important travail de recherche et de diffusion d’informations
sur les réfugiés palestiniens. Animée par une équipe
de huit personnes dont quatre chercheurs, elle dispose d’un centre de
documentation et d’une bibliothèque et publie une Lettre d’information
en anglais et en arabe, en ligne sur le site Internet de l’ONG.

Shaml a produit en avril dernier une exposition photographique qui commémore
l’invasion du camp de Jénine, en collaboration avec la photographe
Joss Dray, inaugurée au centre Sakakini, à Ramallah.

Comment continue-t-on à faire de la recherche et de l’art dans
un pays en guerre, en particulier à Ramallah ?

La réaction israélienne à la deuxième Intifada
a une caractéristique particulière : c’est un projet de punition
collective et une tentative d’empêcher les gens de travailler et
de créer. Nous avons encore vécu cela récemment,
pour la logistique de notre nouvelle exposition photographique sur le
camp de réfugiés de Jénine : les difficultés
pour monter cette expo étaient énormes, Ramallah était
sous couvre-feu, nos employés ne pouvaient pas se déplacer
d’une ville à l’autres… J’ai du recruter une personne supplémentaire,
avec un passeport de Jérusalem, pour qu’elle puisse se rendre à
Jéricho, ce qui est impossible pour un résident de Ramallah.
Notre programme de recherche se trouve aussi bloqué, la seule issue
pour continuer à travailler est d’employer des chercheurs étrangers
qui ont la possibilité de se déplacer. Le coût financier
pour contourner ces difficultés est énorme, car les salaires
vont du simple au double, selon la résidence, et non selon la qualification !

Il faut ajouter à cela le saccage et la destruction par l’armée
israélienne, en avril dernier, de plusieurs théâtres,
cinémas et centres culturels, dont le Centre Sakakini. Au quotidien
cela se traduit par une baisse des productions culturelles mais surtout
par une démotivation des gens, qui ont perdu l’envie de sortir.
Après Oslo, Ramallah et d’autres villes comme Naplouse étaient
très vivantes, les rues fourmillaient de gens. Les mêmes
qui se terrent aujourd’hui chez eux, et regardent les émissions
télévisées provenant du reste du monde, grâce
à leur parabole, très répandue chez nous. A Shaml,
nous avons créé récemment un ciné-club pour
essayer de mobiliser les gens et d’élargir le débat sur
les problèmes des réfugiés, mais aussi sur des sujets
mondiaux. Nous venons de projeter un film sur les Juifs irakiens en Israël,
Forget Bagdad, qui a obtenu son petit succès, un public d’une cinquantaine
de personnes qui ont pu participer au débat après la projection,
pendant qu’une dizaine des chaînes de télévision locales
retransmettaient la soirée.

Pensez-vous que la culture soit un enjeu important dans le conflit
 ?

Oui. Et surtout, l’existence d’un débat, en général,
et, particulièrement, sur des sujets essentiels, tels que l’histoire
et le problème des réfugiés. Cela peut aider les
Palestiniens, qui vont être bientôt invités à
prendre des décisions primordiales, à prendre les choses
en main, à réfléchir, et à ne pas être
seulement les objets d’une surenchère pour l’establishment. Car
tous parlent au nom des "masses", même si les masses ne
partagent pas certains choix.

Êtes-vous sollicité, à propos du problème
des réfugiés, dans le cadre de la "feuille de route"
 ?

Oui, je suis fréquemment sollicité. Je pense que la feuille
de route est un levier pour remettre Oslo - qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime
pas - sur la table des négociations, et c’est une bonne chose.
Mais ce ne sera pas facile. A Shaml nous avons une position précise :
nous parlons de "sociologie du retour" et pas seulement de "droit
au retour". Mais, sur la feuille de route, nous sommes comme tous
les Palestiniens, partagés, en même qu’envahis par un sentiment
de fatigue de plus en plus prégnant.

Shaml - Centre sur la diaspora et les réfugiés
palestiniens
(Shaml - The Palestinian Diaspora & Refugee Centre)

Créé en 1994, Shaml a la mission de sensibiliser
le public local et international à la situation de la diaspora
et des réfugiés palestiniens, grâce à
un travail de recherche comparatif sur la question des réfugiés.
Cette ONG poursuit aussi l’objectif de favoriser le renforcement
des liens entre la communauté palestinienne des Territoires
et la diaspora.

Parmi ses axes de recherche :
- Mémoires d’exil : Projet d’histoire orale palestinienne :
La construction de la mémoire chez la jeunesse, cours d’été
en art et en histoire orale dans le camp de réfugiés
de Jénine (juillet 2002). Perspectives américaines
et européennes sur l’exode palestinien de 1948-1949.- Vie
transnationale : "Bidoun", être apatride dans le
monde arabe. Création d’un réseau académique :
"Transnationalisme, genre et citoyenneté au Moyen-Orient".
- Retours de migrations : perspectives critiques sur l’intégration
des réfugiés palestiniens dans les territoires occupés
et en Israël ; l’urbanisation des camps de réfugiés
dans la bande de Gaza. Projet de mise en réseau des organisations
se consacrant aux réfugiés palestiniens. Organisation
de séminaires, conférences et ateliers : en 2002, "Les
tendances récentes de l’intégration des réfugiés
palestiniens" ; "L’urbanisme en Palestine" ; "Les
nouvelles portes de Jérusalem. Apartheid is real" (exposition
en collaboration avec la photographe Joss Dray).

Shaml est membre du Réseau des ONG palestiniennes (PNGO)
.P.O. Box 2456
Ramallah - Palestine
Tél. +972 2 298 75 37 - Tél. 298 84 42 - Fax : +972
2 298 65 98
E.mail : info@shaml.org
http://www.shaml.org



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